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République dominicaine

Visite de la décharge

Le 23 août 2017, le navire Race for Water s’est amarré au port militaire de Saint Domingue en République Dominicaine. Grâce au précieux soutien de l’Armée Dominicaine, de l’Ambassade Suisse,  et de la Chambre de Commerce et du Tourisme Dominicano-suisse, l’équipe de l’ Odyssée  Race for Water a mené de nombreuses actions de terrain. Une escale entrecoupée du passage du cyclone Irma, dont l’équipe de la Race for Water Odyssée ne peut que pleurer les pertes humaines, dégâts locaux et désastres environnementaux. Un état de fait dont la pollution plastique grandissante ne fait que noircir le tableau avec, dans le cas de la République Dominicaine, une production de 500 000 tonnes de déchets plastiques par année. Une situation à laquelle la Fondation tente de trouver des solutions.  

 

« Le port militaire de Saint Domingue est situé à l’endroit où les deux rivières de la ville se jettent dans l’océan, indique Camille Rollin. Lors de fortes pluies, nous avons très rapidement constaté que le nombre de déchets affluant vers la mer augmentait considérablement. »

Ni une ni deux, une partie de l’équipe part sur la rivière Ozama appelée Rio afin de remonter le courant pour mener son investigation. Après à peine 10 minutes de navigation sur une petite embarcation, la rivière passe en plein cœur de la ville de Saint-Domingue où vit 75% de la population sur un quart du territoire. Comme une sorte de bidonville, des maisons en tôle semblent flotter sur l’eau, entre les amas de déchets. Les poules et les cochons déambulent sur les tas d’ordures en quête de nourriture

Au milieu de ce décor accablant, des enfants s’amusent. « Les gens se lavent, se baignent et pêchent dans cette eau devenue opaque. Ne connaissant pas les effets dévastateurs d’un tel geste, ils y jettent chaque jour leur déchets », raconte Camille Rollin. « Certains villages perchés en haut de falaise ont littéralement recouvert la roche de leurs détritus jusqu’à la rivière ».

Cependant,  le pire restait à venir : la décision a été prise de faire demi-tour au moment où des bulles sont apparues à la surface de l’eau. « Nous avons d’abord pensé à du méthane qui est produit par la décomposition des déchets organiques. Puis l’eau s’est véritablement mise à bouillir, et une forte odeur de soufre a envahi nos narines. Seul le déversement de produits chimiques peut créer ce genre de réaction…».  

 

Des ONG locales  

Dans les années 2000, avec l’aide de fonds européens un projet a été lancé afin d’assainir la rivière et les villages environnants. Pour ce faire, AFUNSAREC (Association de Fondations communautaires pour l’assainissement et le recyclage) est créé  afin de nettoyer la zone, d’organiser la collecte et de sensibiliser les populations. Un travail en lien étroit avec les municipalités locales, responsables de la gestion des déchets. « Ces organisations manquent clairement de moyens, et font du mieux qu’elles peuvent pour que la majorité des déchets ne terminent pas dans l’eau mais à la déchèterie. Ils parviennent à envoyer une certaine partie en recyclage. Rien ne les y oblige mais ils le font car ils en connaissent les bienfaits environnementaux», témoigne Camille Rollin.  

Avec l’envie d’en savoir plus, les membres de l’Odyssée Race for Water ont également rencontré Giny Heinsen. Auxiliaire de la marine, elle s’implique depuis de nombreuses années en tant que consultante en environnement pour le programme Sustainabilidad 3R. Engagée auprès des collecteurs de rue, des entreprises, des écoles et des gouvernements pour sensibiliser au tri et à la gestion des déchets, elle est connue de tous. « Grace à Ginny, nous avons pu remonter toute la chaîne de réseau du déchet plastique », dit Camille.  

Décharge – collecte – tri  recyclage 

La décharge de Saint Domingue, appelée Duquesa, regroupe 80% des déchets solides de Saint-Domingue420 camions poubelles y déversent chaque jour leurs lots de déchets carnés, ménagers et industriels, sans parler des eaux usées qui terminent également dans la décharge. Au cœur de ces montagnes d’ordures, 900 collecteurs appelés « busos » (« plongeurs »..) travaillent dans des conditions de vie inhumaines. Leur connaissance est en revanche précieuse. Ils sont devenus des experts du recyclage. Parmi les déchets plastiques, ils reconnaissent sans hésitation le polyéthylène, le polypropylène et le PET, seuls types de plastiques ayant de petits débouchés dans la région.  

« Les busos récupèrent ce qu’ils peuvent afin de les vendre aux gérant de la décharge qui ont monté une association afin de bénéficier d’un marché juteux puisqu’ils me revendent au prix fort la matière récupérée à bas prix… », témoigne Jorge Rizek, grossiste entrepreneur. Après ce premier tri dans la décharge, les grossistes nettoient, déchiquètent et trient le plastique par couleurs  « Il nous est possible de préparer jusqu’à trois tonnes de déchets par jour avec moins de 10 personnes mais nous dépendons fortement de la quantité que nous parvenons à récupérer de la Duquesa», explique le grossiste. La matière est ensuite exportée à l’étranger ou revendue localement à des entreprises de recyclage comme Frankenberg également visitée en compagnie de Ginny Heinsen. Une bonne partie de leur mobilier de jardin et produits ménagers sont fabriqués à 100% à partir de plastique recyclé ! Un cercle vertueux puisque le produit recyclé est à priori recyclable ! 

En plus de la Duquesa, les rues de Saint Domingue ont leur propre réseau de recyclage avec des points de collectes qui récupèrent plus facilement le métal, l’aluminium et le carton. « La filière du plastique recyclé est très difficile. Le prix du PET s’est par exemple effondré en un an avec la chute du pétrole et la fermeture de certains débouchés en Chine » explique Jadame Gonzalez, responsable d’un point de collecte en ville qui récupère chaque mois 2 à 3 tonnes de déchets plastiques ramassés par les collecteurs de rues de la capitale.  

Un réseau en place qui pourrait évoluer, s’améliorer grâce à des technologies de valorisation énergétique comme celle proposée par la Fondation qui ouvre de nouvelles perspectives de gestion locale tant au niveau du traitement des déchets plastiques que de la création de valeur et de la production d’énergie.